L’Astuce

Marchés actions : la crise est effacée…pour combien de temps ?

par | Mar 28, 2022 | Actualités, International

Un mois après le début du conflit Ukrainien les marchés actions sont revenus à leur niveau d’avant crise. L’inflation s’emballe, les tensions diplomatiques sont à leur comble, sur le terrain la situation militaire et humanitaire s’aggrave et pourtant les investisseurs semblent être redevenus confiants. Une situation surprenante à bien des égards, qui masque cependant de profondes évolutions laissant entrevoir que l’histoire n’est pas encore écrite pour les marchés action, loin s’en faut.

« Lorsque l’on étudie l’histoire boursière de tous les conflits – y compris les Guerres Mondiales – on constate qu’il y a toujours eu trois séquences, explique Olivier Raingeard chief investment officer de Neuflize OBC. D’abord, une phase de baisse des marchés action, soudaine, rapide et d’une ampleur qui dépend de l’intensité de l’évènement géopolitique. Ensuite, une phase de rebond, souvent très marquée : historiquement, au bout de six mois les marchés avaient dépassé leur niveau d’avant-crise dans 70% des cas et cette statistique s’élève à 85% au bout de 12 mois. A plus long terme, enfin, un évènement géopolitique n’a aucune conséquence économique à condition qu’il n’ait pas d’impact prolongé sur les prix des matières premières ».

Dès lors, selon Olivier Raingeard il faut insister sur cette notion « d’impact prolongé » car c’est clairement elle qui constitue la clef du conflit actuel impliquant un pays, la Russie, ayant un poids considérable sur les marchés des matières premières. Et c’est la raison pour laquelle il est beaucoup trop tôt pour pouvoir déclarer aujourd’hui que la crise est passée pour les marchés.

Pour s’en convaincre, il suffit de regarder d’où vient le rebond boursier actuel. Depuis le 25 février, l’indice phare du marché européen, le DJ Stoxx 600 (qui englobe des valeurs anglaises et suisses) est stable, à 0%. Mais la composante sectorielle « Materiaux de base » (comprenant les valeurs minières) progresse de 8% tandis que les valeurs du secteur « énergie » progressent de 4%. Ces sociétés sont évidemment tirées par l’envolée des prix de matière première. L’autre secteur qui progresse fortement est la Santé (+ 5%) car considéré comme défensif et peu exposé aux tensions inflationnistes.

De l’autre côté du spectre il y a aussi de fortes baisses, notamment dans le secteur de la consommation qui souffre des craintes de voir les ménages réduire leurs dépenses à cause des tensions inflationnistes et le secteur automobile qui chute de 12% en raison de sa forte exposition aux pays de l’Est.

Dans ce contexte, rien n’est joué et tout rebond généralisé des marchés reste très fragile. La nervosité reste forte du côté des investisseurs qui s’interrogent sur la rapidité du durcissement des politiques monétaires, les banques centrales étant obligées d’accélérer leur combat contre la hausse des prix. « L’autre élément important, poursuit Olivier Raingeard, sera la question des bénéfices des entreprises avec une croissance économique qui ralentit et une inflation qui reste assez élevée et va même accélérer dans les 2 prochains mois. La question qui se pose c’est comment les entreprises sont-elles capables d’absorber la hausse des coûts des matières premières ? ».

Autant dire que l’histoire boursière de 2022 est encore loin d’être écrite.

M