Pour envisager la réforme en France, regardons ce qui se fait à l’étranger…
Buts et mécanismes du système de retraite suédois.
La Suède a introduit en 1960 un régime public de retraite par répartition lié à la rémunération, un régime équivalent pour tous ceux qui perçoivent des revenus dans le pays. Ce plan a fait l’objet d’une réforme en 1994/1998 et résulte de la prise de conscience qu’il y avait un risque à faire financer tout le système par la population active.
La Suède ne fait pas figure d’exception dans la tendance qu’ont suivi tous les régimes de retraite en Europe et hors d’Europe et qui consiste à diminuer les déficits financiers des systèmes de retraite publics. Ainsi, l’un des objectifs de la réforme de régime suédois a été de créer un régime stable et sain financièrement.
La stabilité financière a d’ailleurs été interprétée de manière très orthodoxe, le système a dû être conçu pour financer les retraites à un taux fixe. C’était inédit et cela le reste encore aujourd’hui pour un régime de retraite par répartition !
Cette exigence de stabilité financière pouvait également être exprimé sous la forme d’un objectif social. L’intérêt d’un plan financièrement solide est qu’il ne reporte pas le fardeau économique sur les générations futures.
La réforme avait également d’autres objectifs. L’une d’elles consistait à resserrer le lien entre le revenu et la pension, et à faire en sorte que ce lien soit le même pour tous les travailleurs. C’est-à-dire que les revenus sur lesquels des cotisations sont prélevées lorsqu’un travailleur est jeune doivent avoir autant de valeur dans le calcul de la pension que lorsqu’il est âgé. Les artisans de la réforme espéraient qu’un lien aussi direct entre les cotisations sur le revenu et la pension pousserait les travailleurs à considérer leurs cotisations comme des contributions et non comme des impôts. On espérait que cela constituerait une incitation supplémentaire au travail.
Un autre objectif de la réforme était de remplacer les transferts de revenus, caractérisés comme opaques et non systématiques dans le régime prééxistant, par des transferts de revenus perçus comme transparents et systématiques. Le système qui prévalait calculait la prestation de retraite en utilisant les 15 meilleures années de revenu. Cette règle favorisait clairement les personnes ayant un revenu élevé au cours des 15 dernières années de leur carrière, ce qui est plus typique des cols blancs que des cols bleus. Tels sont les principaux objectifs de la réforme que nous avons mise en œuvre.
Pour atteindre une stabilité financière de manière automatique, un système de retraite doit décider de la manière dont il va s’adapter à l’évolution économique et démographique et des modalités pour intégrer ces données dans les règles du régime de retraite. Si la stabilité financière est atteinte tout en maintenant un taux de cotisation fix, et sans gonfler les finances du régime avec des subventions fiscales, tous les effotrs doivent focaliser sur les pensions. Soit les pensions en cours de versement soit les futures pensions, soit encore les deux types de pensions, doivent s’adapter à l’évolution économique et démographique et ces évolutions doivent être explicitées de manière transparente dans la législation.
En bref, la méthode du nouveau régime de retraite suédois consistait à imiter le modèle dune épargne standard. Autrement dit, toute cotisation versée par l’employé, l’employeur ou le gouvernement/les contribuables au nom de l’employé est enregistrée comme un paiement sur le compte de retraite des assurés. Les cotisations de retraite que l’État verse sont celles qui sont payées au titre des chômeurs, des malades, des personnes en congé parental et des personnes handicapées, ainsi que des personnes ayant des enfants en bas âge. Le montant réel des cotisations est versé sous forme de pension aux retraités actuels, comme c’est le cas dans un régime de retraite par répartition. Dans ce cas, le compte de retraite des assurés rapporte un intérêt qui est égal à l’évolution du revenu moyen en Suède et les informations sur l’évolution du compte de retraite sont disponibles sur Internet et distribuées chaque année à tous les assurés dans l’enveloppe « orange ».
La structure du compte de retraite implique qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un « âge normal » pour sa retraite, il y a seulement un âge plus précoce pour percevoir la prestation de pension. Cet âge était de 61 ans jusqu’en 2019, il est maintenant de 62 ans et devrait passer à 63 ans en 2023 puis à 64 ans en 2026. À partir de cette année-là, il augmentera d’environ deux tiers de l’augmentation de l’espérance de vie. La pension est simplement calculée en divisant la valeur du compte de pension par l’espérance de vie de la cohorte de naissance à l’âge où la pension est versée. Cela permet d’obtenir un bon compromis financier compte tenu des augmentations de l’espérance de vie.
Cela implique que les jeunes générations devront, soit accepter une pension mensuelle inférieure à celle de leurs aînés s’ils choisissent de prendre leur retraite au même âge que ces derniers, soit retarder l’âge de la retraite. Ainsi, si l’espérance de vie augmente, pour un niveau de pension stable, chaque génération doit ajuster l’âge de la retraite afin que chaque génération passe le même ratio d’années de travail par rapport aux années de retraite.
La structure du compte de retraite implique également que les assurés puissent facilement travailler et avoir une pension en même temps, ou changer la pension qu’ils ont et recommencer à travailler. Les revenus généreront toujours de nouvelles cotisations de retraite et augmenteront la pension. Le régime public de retraite comporte également une partie qui est entièrement financée, la pension de retraite par primes. Il existe également une pension garantie et une allocation de logement qui assure un niveau de revenu minimum pour les retraités qui ont eu un revenu modéré ou faible tout au long de leur vie. Ces prestations sont financées par les recettes fiscales générales et non par des cotisations.