En France, en 2017, l’espérance de vie à la naissance est de 85,3 ans pour les femmes et de 79,5 ans pour les hommes. La France est l’un des pays d’Europe et de l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) où l’espérance de vie est la plus élevée. L’espérance de vie a connu depuis la fin de la guerre une formidable progression. Cette croissance ralentit certes, elle n’en continue pas moins. Ainsi l’espérance de vie calculée à 60 ans est de 27,5 ans en moyenne pour une femme et de 23,2 ans pour un homme. Sur les deux dernières décennies, l’espérance de vie à 60 ans enregistre une hausse de 2,3 ans pour les femmes et 3,3 ans pour les hommes. Cette dernière donnée illustre la hausse de l’espérance de vie, non sans conséquences sur notre système de protection sociale. Des années de vie gagnées, ce sont des dépenses de retraite, de santé et de dépendance supplémentaires qu’il faut financer, de manière publique ou privée.
En France, en 2016 les prestations sociales représentent 714,5 milliards d’euros, soit 32,1 % du Produit Intérieur Brut (PIB). Bien que la tendance démographique en Europe soit comparable (vieillissement de la population), notre niveau de dépense est supérieur à la moyenne européenne de cinq points de PIB. Cette dépense qui est très majoritairement publique (sécurité sociale), montre des signes de tension et cela alors que les effets générationnels ne sont pas encore à leur apogée (arrivée des générations du « baby-boom » en âge de retraite). La hausse de la Contribution Sociale Généralisée (CSG), et l’actuel débat autour de la fiscalité directe et indirecte (gilets jaunes), illustre la difficulté de financer les dépenses nouvelles par la seule levée de l’impôt.
Pour ce qui concerne la France, elle compte aujourd’hui environ 1,4 million de personnes en situation de dépendance1. A l’horizon 2040, on estime qu’1,8 million de Français pourraient être concernés et même 2,3 millions de personnes d’ici 2060. Les dépenses liées à la dépendance avoisinent aujourd’hui les 34,2 milliards d’euros (environ 1,6% du PIB). Elles se composent de dépenses de santé (12,2 milliards d’euros soit 36%), de prise en charge de la perte d’autonomie (10,5 milliards d’euros soit 31%) et d’hébergement (11,5 milliards soit 34%). Un financement majoritairement public puisque Sécurité sociale, Etat et Collectivités prennent en charge 70% de la facture totale. Ce qui signifie aussi qu’il reste déjà 30% de cette dépense à la charge des ménages.
Selon une récente étude2 de la Direction de la Recherche de l’Evaluation et des Etudes Statistiques (DREES) « la participation financière restant à la charge des résidents, une fois déduites les contributions des obligés alimentaires et les différentes allocations, est estimée à au moins 1 850 euros par mois pour la moitié d’entre eux ». Dans la mesure où la retraite (moyenne) des ménages français est d’environ 1500 euros par mois, cette dépense ne peut être financée par les seuls revenus courants. Le « principal moyen de paiement » cité par les séniors est l’épargne. Ainsi, « un tiers des résidents indiquent puiser dans leur épargne pour payer les dépenses liées à la perte d’autonomie ». 11% citent mobiliser leur entourage, 5% vendent du patrimoine. Si « à l’avenir, 36 % de l’ensemble des résidents estiment pouvoir financer leur dépendance avec leurs ressources courantes », l’étude démontre que l’épargne (+9 points), l’entourage (+5 points) et le patrimoine (+4 points) seront davantage sollicités.
Si le patrimoine financier des ménages est important, plus de 5.000 milliards d’euros (2017), et apparait comme un réservoir naturel pour financer ces dépenses, il demeure inégalement réparti et ne peut apporter une réponse totale à la problématique. Le patrimoine non financier, encore plus important que l’épargne (6.880 milliards d’euros d’immobilier) apparait lui aussi comme un important réservoir. Près de 75% des plus de 65 ans sont propriétaires, ce qui couvre une importante partie de la population visée (58% pour l’ensemble de la population française). L’immobilier pose toutefois le problème de sa liquéfaction, afin que le patrimoine soit mobilisable. Des dispositifs tels que le viager existent bien entendu mais ils demeurent pour le moment peu développés. Il faudra donc dans le futur penser de nouveaux dispositifs. Une chose est sûre, il apparaît compliqué pour l’Etat, et donc le contribuable, de supporter les besoins de financement futurs tant ils sont importants, tant la pression budgétaire devient difficilement supportable.
Les arbitrages budgétaires déjà complexes risquent de s’aggraver encore au regard de ces tendances. Les débats actuels autour des modalités de financement de la retraite, de l’orientation et la préservation de l’épargne en ce sens, contribuent à faire prendre conscience de la nécessité de préparer cet avenir.
1/. Personnes bénéficiaires de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA)
2/. https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er1095_toile.pdf