73 articles, une commission spécialement dédiée, cinq rapporteurs, plus de 2000 amendements déposés, si le projet de loi relatif à la Croissance et la Transition des Entreprises a pu parfois passer au second plan en raison de l’actualité, ne nous y trompons pas, il s’agit d’un projet de loi central dans la réforme de l’économie souhaitée par le Président et porté par son Ministre des Finances.
A travers les premières lois de finance du quinquennat, l’exécutif a modifié certaines règles de la fiscalité : hausse de la Contribution Sociale Généralisée, flat tax, suppression partielle de la taxe d’habitation, suppression de l’Impôt Sur la Fortune remplacé par l’Impôt sur la Fortune Immobilière, etc. Si l’on devait résumer l’ensemble des mesures prises, il s’agit principalement de transferts au profit des ménages actifs, et pour les actifs productifs face aux actifs improductifs (produits financiers contre immobilier). L’idée centrale est de valoriser et encourager le travail, ainsi que l’activité, afin de stimuler l’économie. Cela allait de pair avec la loi de flexibilisation du marché du travail, et aujourd’hui les négociations en cours sur l’indemnisation du chômage et la réforme des retraites à venir. Pour compléter ce dispositif et toujours dans le but de dynamiser l’économie, l’exécutif a imaginé un Plan d’Action pour la Croissance et la Transition des Entreprises, c’est le projet de loi PACTE.
Comme son nom l’indique, la loi PACTE, votée la semaine dernière en première lecture à l’Assemblée nationale, concerne essentiellement les entreprises. Son objectif est de créer les conditions favorables qui permettront aux entreprises d’accroître leur compétitivité. Selon le rapporteur général du texte la « loi Pacte est un nouveau modèle économique pour la France ». La loi présente un grand nombre de mesures qui l’a fait qualifier de « fourre-tout ». Néanmoins, elle répond à une architecture cohérente : dans un premier temps (chapitre 1) l’idée est de faciliter la création, la transformation et la transmission d’entreprises, c’est notamment la création d’un guichet unique qui centraliserait les demandes et informations dans le cadre de la création d’entreprises. Le projet de loi entend également relever le seuil de 3,1 millions d’euros à 8 millions d’euros pour l’obligation de nomination d’un commissaire aux comptes. La mesure vise directement les PME pour lesquelles les mesures réglementaires sont jugées trop lourdes et coûteuses. Dans la même philosophie, le forfait social sera supprimé pour les entreprises de moins de 250 salariés, l’obligation d’avoir un règlement intérieur est portée de 20 à 50 salariés, des mesures qui là encore ciblent les PME.
Le second chapitre, dont l’objectif est de rendre les entreprises plus innovantes, concentre les mesures destinées à améliorer et diversifier les financements des entreprises. L’épargne-retraite, l’assurance-vie et la cryptomonnaie sont concernées, nous y reviendrons plus longuement dans un second article spécialement dédié à ces questions. Ce chapitre répond à un double objectif, permettre aux entreprises de trouver les financements, mais également réorienter une grande partie de l’épargne des Français jugée improductive. Enfin, le texte contient des privatisations d’entreprises publiques telles que Aéroport de Paris ou la Française des Jeux, ainsi qu’une mesure qui a généré beaucoup de débats, l’inscription dans le code civil du « rôle social et environnemental » de l’entreprise.
Le calendrier parlementaire étant particulièrement dense en raison de l’examen des textes budgétaires ainsi que des nombreuses réformes en cours, le texte ne sera pas examiné par les sénateurs avant 2019. Mais ce retard ne semble pas remettre en cause le calendrier voulu par le ministre, une partie des mesures du texte seront mises en œuvre dès 2019.
L’enjeu central de la loi est donc bien de favoriser la constitution d’un « mittlestand » à la française, c’est-à-dire de permettre à des PME/PMI de grandir en supprimant des seuils considérés comme handicapants.
Le débat ne sera néanmoins pas clos par cette loi. D’une part parce que les effets de ces mesures ne se manifesteront pas immédiatement dans l’économie, d’autre part parce qu’on peut craindre qu’il subsiste encore trop de barrières économiques et réglementaires pour susciter une expansion rapide de ces entreprises.
Il reste au gouvernement de consolider les comptes publics et contenir la dépense afin de pouvoir poursuivre son programme de réduction des charges pour les acteurs économiques et de refonte du système de retraite.