Valérie Plagnol, présidente du Cercle des Épargnants, a présenté la semaine dernière aux côtés de Brice Teinturier (Ipsos), les résultats de notre seizième enquête annuelle consacrée aux Français, à l’épargne et à la retraite. Cette étude réalisée chaque année a pour objet de récolter les réponses à des questions portant sur des thématiques d’épargne et de préparation à la retraite. Notre expérience et ancienneté nous permet d’analyser ces résultats dans le temps et de mesurer les dynamiques en cours. Ce très récent sondage, puisque réalisé entre le 27 février et le 5 mars 2018 auprès d’un échantillon représentatif, nous permet de vous restituer le plus fidèlement possible les sentiments et les attentes des Français.
Première constante : les Français sont inquiets pour leur retraite
Plus de 7 Français sur 10 se disent inquiets pour leur retraite (73 %). C’est un niveau très élevé mais identique à celui enregistré l’année dernière. A l’opposé 13% des sondés seulement se disent « confiants ». Ce résultat s’explique par de sérieux doutes émis sur la pérennité de notre système de retraite, une source d’inquiétude pour 84% des Français. La retraite est attendue, elle est synonyme de « nouvelle vie » et de « loisirs » pour 68% et 63% des sondés (+3 points), mais elle pose inévitablement l’épineuse question matérielle de son financement. 83% des actifs redoutent de manquer d’argent une fois arrivés en retraite, un chiffre qui enregistre une hausse de +4 points par rapport à l’an passé. Cette crainte gagne désormais les retraités eux-mêmes. Ils sont dorénavant une majorité à penser que leur niveau de ressources est insuffisant pour vivre correctement leur retraite (53%). Il s’agit là d’un basculement de situation qui peut s’expliquer par les récents débats autour du pouvoir d’achat des retraités et de la hausse de la Contribution Sociale Généralisée intervenue en début d’année. C’est un chiffre (53%) en hausse de 10 points en comparaison avec notre enquête de 2017.
Pourtant, seule la moitié des Français épargne en conséquence. 57% des actifs (+1 point) et 56% des retraités (-3 points) prennent des dispositions d’épargne. La préparation à la retraite est la seconde motivation d’épargne des ménages, derrière la précaution. Pour ce faire, ces derniers plébiscitent encore une fois l’assurance-vie, meilleur produit à leurs yeux, 44% et même 57% pour les seuls retraités, devant l’incontournable Livret A 35% (+3 points) et le PEL 27% qui décroche (-7 points) du fait de la baisse de son rendement. Quatre Français sur dix possèdent une assurance-vie (39%, +3 points) et 11% envisagent d’en souscrire une. 62% des Français préfèrent « un produit qui rapporte peu mais peu risqué » démontrant une nouvelle fois leur aversion au risque. La faiblesse des taux d’intérêt semble moins évidente cette année pour une partie de la population (taux bas 78%, mais -5 points), ce qui par symétrie expliquerait le recul du penchant pour l’investissement immobilier (11%) qui enregistre un recul de 7 points.
En matière d’épargne et de retraite, les grandes lignes demeurent, nous enregistrons davantage d’adaptations que de révolutions. Mais alors que le Gouvernement prépare un important texte de loi qui pourrait modifier le cadre réglementaire de l’épargne, nous avons souhaité interroger plus spécifiquement les Français sur le financement des entreprises par l’épargne individuelle, un des objectifs de cette future loi. Tout d’abord ces derniers ont une connaissance limitée de l’utilisation de l’épargne. Ils pensent qu’elle sert à financer l’activité des banques en priorité et qu’elle bénéficie aux particuliers en dernier lieu. Cependant, pour une majorité (44% contre 30%), le financement des entreprises par l’épargne individuelle n’est pas une priorité, ce qui spontanément semble opposé à la réorientation de l’épargne vers le financement de l’économie souhaitée par le Gouvernement. Et encore moins vers les petites entreprises, dernier critère de placement (45%) des ménages loin derrière la garantie du capital (79%) ou la liquidité du produit (76%).
Cette année confirme donc les préférences comme les attentes des français dans leur ensemble. La crainte de voir son revenu diminuer à la retraite, comme la volonté de préserver son capital quitte à y sacrifier le revenu, sont des constantes fortes partagées par une très grande majorité des épargnants. Faut-il s’en plaindre ? Pas forcément, on peut trouver que le bon sens l’emporte et que la notion de risque/rendement soit assez bien comprise (si l’on veut plus de rendement, il faut accepter plus de risque).
Il ressort aussi de notre enquête qu’une large majorité des épargnants se considère comme mal informée et de plus trouve qu’il est important d’éduquer les enfants à l’épargne. Nous ne saurions trop encourager les acteurs de l’éducation dans cette voie. La formation des personnes à la gestion de leur propre finance constituerait sans doute un moyen de former des consommateurs et des épargnants avertis, et peut-être de limiter dans certains cas le surendettement.