L’immobilier est au centre des préoccupations patrimoniales des ménages français, et à juste titre car il représente 61% du patrimoine brut des ménages. Selon le Crédit Foncier, en 2017 le montant total de dépenses de logement en France s’est élevé à 485 milliards d’euros. Génération après génération, le désir d’accession à la propriété est toujours aussi fort. Cet objectif se retrouve même au cœur de la stratégie d’épargne et de constitution de patrimoine des ménages.
2017 a été une année de records : 1.250.000 transactions immobilières particulières ont été enregistrées, contre 931.000 en 2014 par exemple. L’année peut être qualifiée d’« excellente » sans aucune contestation, avec toutefois des disparités entre les régions, entre zones urbaines denses et zones rurales. Cette dynamique, parfois même cette frénésie, a tiré les prix à des niveaux record également comme à Paris où le prix du mètre carré vient de dépasser les 9.200 euros, en hausse de +7,7% sur un an. Dans le 6ème arrondissement, arrondissement le plus cher de la capitale, il faudra même en moyenne débourser plus de 13.000 euros du mètre carré. Selon le réseau immobilier Century 21, la transaction moyenne à Paris s’élève à 452.545 euros, contre 200.000 euros il y a plus de onze ans (+126%).
L’impressionnante inflation immobilière parisienne se retrouve dans d’autres grandes villes et agglomérations telles que Bordeaux. La ville enregistre sur un an une hausse conséquente de +12%, alimentée en partie par des investisseurs. Cette hausse importante et soudaine a même créé des tensions au sein de la population1. Des mouvements, représentant les bordelais « historiques » ont pointé du doigt les « parisiens » comme responsables de cette inflation. Les améliorations de la ville, le train rapide, ont beaucoup contribué à ce regain d’attractivité.
Sur le plan économique et sociétal, l’inflation immobilière pose la question de l’évolution de l’habitat en zone urbaine dense : quels seront les ménages de demain dans les centres-villes, si les primo-accédant solvables, à revenus moyens, non éligibles aux aides, ne peuvent plus s’y loger ? Si les taux de crédit immobilier ont permis dans un premier temps de gagner en pouvoir d’achat, la forte poussée des prix efface de plus en plus les économies escomptées. Même si pour le moment les taux d’intérêt restent faibles et intéressants : taux moyen de 1,54% en novembre 2017, contre 1,31% en novembre 2016, pour rappel 5,15% en novembre 2008 (sur 20 ans). Il faut tout de même consacrer 5,2 revenus annuels en Région parisienne pour accéder à la propriété, et 4,6 en Province.
Le pronostic des professionnels du secteur
Selon le récent baromètre CSA publié la semaine dernière pour le compte du Crédit foncier, « 4 professionnels sur 5 (80%) » sont optimistes quant à l’avenir du marché immobilier sur les douze prochains mois. Le résultat est stable en comparaison aux précédentes enquêtes de septembre ou avril 2017 (respectivement 82% et 80%). En ce qui concerne les prix, et le nombre de transactions, aussi bien dans l’ancien que dans le neuf, les professionnels parient sur une stabilisation à ce niveau élevé. Ils s’accordent pour juger les fondamentaux suffisamment bons pour maintenir cette tendance. Nous pouvons citer notamment les faibles niveaux de taux d’intérêt, la dynamique de marché et le contexte économique (hausse de l’emploi notamment). Inversement, l’évolution de la réglementation dont la fiscalité, les interrogations autour des dispositifs d’aides au logement, sont autant de sujets qui les inquiètent.
Selon l’INSEE, la France compte 34,8 millions de logements, dont 82% sont des résidences principales. Dans la quête de logement des ménages, l’évolution des taux de crédit immobilier sera déterminante, en particulier pour les primo-accédant. Une variation aura des répercussions immédiates sur la décision d’achat, sur le choix du bien (superficie ou emplacement), la durée du crédit, etc…De ce point de vue, une baisse relative de la demande pourrait contribuer à stabiliser sinon à faire baisser les prix. En ce qui concerne les investisseurs particuliers, à des niveaux de prix aussi élevés, les perspectives de plus-value future se posent davantage que par le passé, les capacités d’investissement des ménages peuvent aussi se poser (coût médian d’une opération d’investissement locatif en hausse de 7% en deux ans). La bonne santé des marchés, la faible rémunération de l’épargne réglementée, l’évolution de la fiscalité (épargne et immobilier), sont autant de paramètres que les épargnants devront intégrer dans leur stratégie patrimoniale en cette nouvelle année. Les changements de périmètres, même minimes pourraient contribuer à bousculer le marché. Le problème est que la rigidification du marché, son manque de fluidité, peut aussi induire une moindre mobilité des personnes du côté de l’emploi comme du fléchage de l’investissement. Le logement doit-il être le seul moyen de se constituer une épargne longue et un patrimoine de transmission ?
1 https://www.cercledesepargnants.com/immobilier-baisse-prix-passagere-retournement-de-cycle/