L’Astuce

Les jeunes générations et le vieillissement : repenser sa retraite

par | Oct 24, 2017 | Actualités

La semaine dernière, l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) a publié un rapport intitulé « Preventing Ageing Unequally »1. Ce dernier est consacré au vieillissement de la population et à la perspective d’un creusement des inégalités dans les retraites.

Selon le rapport, les générations nées après 1960 devront composer avec une hausse de l’espérance de vie, des modes de vie différents de leurs aînés, et surtout des inégalités professionnelles et des baisses de pensions de retraite. Autant de facteurs qui vont profondément modifier la période de retraite telle que nous la connaissons et nous la représentons aujourd’hui. Au minimum, la situation matérielle est appelée à se dégrader. Dans le cas particulier de la France, les retraités bénéficient actuellement d’un niveau de vie moyen légèrement supérieur à celui des actifs. Ceci est contraire aux résultats observés dans les pays de l’OCDE, où en moyenne, il est de 12 % inférieur. Deux phénomènes influent fortement sur la situation future des retraites :

  • Une transition démographique et le vieillissement de la population. Selon l’OCDE, « en 1980, il y avait 20 personnes de 65 ans et plus pour 100 personnes d’âge actif en moyenne dans la zone OCDE ; en 2015, ce nombre avait augmenté à 28 et devrait presque doubler d’ici 2050… ». C’est la tendance de fond, elle tire vers le haut le montant total des dépenses (pensions). Elle appelle en retour des réformes qui impactent l’ensemble des citoyens. A terme, la situation se traduit par une baisse des niveaux de pensions.

 

  • La situation personnelle des individus. Les droits à la retraite sont calculés et obtenus sur une période d’activité professionnelle au cours de laquelle l’individu va cotiser. Les difficultés d’accès au marché de l’emploi, ou les carrières accidentées que rencontrent les jeunes générations, risquent de projeter une inégalité présente en une inégalité future. Si le mécanisme français des retraites, ou le système de protection sociale, disposent de leviers de redistribution permettant de gommer en partie les effets de ces inégalités, rien ne nous permet de dire que nous pourrons les financer et les maintenir dans le futur. En Allemagne, pays où le système est relativement proche, mais où les systèmes de redistribution sont moins importants, ce sont ainsi 1 million de retraités qui sont dans « l’obligation » d’exercer une activité professionnelle2.

Retraités actuels, retraités futurs donc nouvelles générations, la littérature scientifique et l’actualité politique nous plongent dans une logique générationnelle, dans laquelle les deux entités se renvoient la « facture » de la protection sociale. La semaine dernière, Jean-Hervé Lorenzi, Titulaire de la Chaire « Transitions Démographiques, Transitions Économiques », animait une rencontre sur le thème : « dépenses de santé et équité intergénérationnelle ». Selon l’économiste, les seuls actifs qui représentent 59,3% de la population paient pour 80,9% des dépenses de santé, les retraités qui représentent 24,5% de la population contribuent à hauteur de 7,4% du financement (11,7% pour les jeunes). Pour ce dernier, on peut s’interroger sur le « juste » niveau de participation de ces derniers. A titre personnel, il prône un alignement du niveau de Contribution Sociale Généralisée (CSG) entre retraités et actifs.

La CSG créée au début des années 1990 est un impôt (ou contribution) visant à assurer le financement de notre protection sociale. La CSG a pour particularité de s’appliquer à l’ensemble des revenus, une assise plus large que les cotisation salariales ou patronales. Elle est au cœur de l’actualité budgétaire. Le Gouvernement vient en effet de soumettre au Parlement une proposition de hausse de la CSG de 1,7 points. Elle s’applique actuellement à différents niveaux selon les types de revenus. Ainsi, les retraités ont un taux de CSG de 6,6% contre 7,5% pour les salariés. Par ailleurs, une partie des retraités est exonérée de CSG et une autre partie bénéficie d’un taux réduit (3,8%), en fonction de critères de ressources. Ils devraient à priori le rester. Au final, la majorité des retraités (60%) devraient voir leur taux de CSG augmenter à 8,3%, un niveau qui sera toujours inférieur à celui des actifs.

Derrière cet exemple de la CSG, qui se veut en partie compensée par une baisse de la taxe d’habitation et la diminution d’une partie des cotisations salariales, se pose l’épineuse question du financement de la protection sociale et de la fiscalité. Face aux enjeux financiers considérables qui nous attendent, en matière de santé, retraite et dépendance, il faudra de toute évidence sortir des oppositions stériles entre nouvelles et anciennes générations, et repenser les modes de financement dans leur ensemble. Ce qui ne signifie pas pour autant exclure la logique de solidarité intergénérationnelle qui bien souvent figure déjà dans la loi. Pour lutter plus globalement contre les risques d’inégalités futures sous toutes leurs formes, l’OCDE préconise d’agir immédiatement, en amont. L’institution cible aussi bien la santé, que l’éducation ou l’emploi. Accroitre la formation et l’éducation des jeunes générations, c’est leur donner plus de chances de réussite professionnelle, d’améliorer leur condition de vie et in fine leur espérance de vie. Ceci nécessite toutefois d’intervenir dans des secteurs qui dépendent très largement d’un financement public… Dans un contexte de finances publiques déjà tendues. La question est de nouveau posée : qui payera pour qui ? Jeunes ou anciennes générations ?

 

 

 

1 http://www.oecd.org/fr/presse/les-jeunes-generations-seront-durement-touchees-par-le-vieillissement-demographique-et-la-montee-des-inegalites.htm

2 https://www.cercledesepargnants.com/allemagne-pres-dun-million-de-retraites-activite/

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