L’Astuce

Sécurité sociale 2016 : on est encore loin du compte

par | Sep 26, 2017 | Actualités

La Cour des Comptes a rendu la semaine dernière son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour l’année 2016. La sécurité sociale, pilier de notre protection sociale, a versé un total de 459 milliards d’euros de prestations. Ce qui correspond à 20,6% du Produit Intérieur Brut. Il s’agit d’un important niveau, supérieur aux moyennes enregistrées dans des pays comparables à la France. La sécurité sociale, plus le Fonds de Solidarité Vieillesse (FSV), enregistrent un nouveau déficit de 7,8 milliards d’euros. Ce dernier est en recul de 3 milliards d’euros, il était encore de 10,8 milliards d’euros en 2015. Il se situe ainsi bien loin du pic de 2010, où sous les effets de la crise le déficit avait atteint 29,8 milliards d’euros. Il retrouve même un niveau antérieur à 2008, 8,2 milliards d’euros alors. Par ailleurs, toutes les branches de la sécurité sociale, ainsi que le FSV, enregistrent une amélioration de leur solde.

A première vue ces résultats sont encourageants. Ils illustrent une amélioration généralisée et certaine de la situation financière de notre protection sociale. Pourtant, à la seule lecture du sommaire de cet imposant rapport, on devine que l’analyse des Sages de la rue Cambon est différente, on sent même une certaine impatience au travers de remarques telle que : «  Revenir sans délai à l’équilibre et éteindre la dette de la sécurité sociale » ; « Un retour à l’équilibre à accélérer, un traitement de la dette à organiser rapidement », etc… Le message est clair, la Cour des Comptes invite les pouvoirs publics à accentuer les efforts qui permettraient d’assainir la situation financière des comptes sociaux. Leur rééquilibrage « reste lent ». Ceci fait en partie écho au décalage d’un an de l’objectif de retour à l’équilibre, à savoir désormais 2020. De plus, la Cour considère que le jeu comptable consistant à inscrire le produit exceptionnel de la Contribution Sociale Généralisée (CSG) pour 0,74 milliard d’euros aux recettes de la branche maladie, biaise la sincérité des résultats.

Le déficit recule donc, mais moins qu’il n’y parait et pas de manière pérenne. Au-delà de ces éléments, il existe également des raisons structurelles d’inquiétudes, récurrentes, qui se vérifient encore pour cette année 2016.

La branche maladie concentre une grande partie du déficit total des comptes sociaux. Pour cette seule branche, il atteint 5,5 milliards d’euros hors produit exceptionnel de CSG. Ce qui représente presque 65% du déficit total (Sécurité sociale et FSV). En comparaison, il représentait 54% en 2015, 49% en 2014. Plus inquiétant, ce déficit ne diminue quasiment pas par rapport à l’année précédente puisqu’il était alors de 5,8 milliards. Ceci illustre une impuissance persistante face à la hausse des dépenses de santé, une incapacité à les maîtriser. Sur le papier, l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) a pourtant été respecté. Réduit à 1,75% pour 2016, contre 2% en 2015, il traduisait même l’ambition des pouvoirs publics d’alors. Pour les Sages, cet ONDAM ne serait que « facialement » respecté, « ce taux est en réalité identique à celui de 2015 ». Il est notamment tiré par des dépenses de soins de ville en nette progression et par l’activité des établissements de santé. La Cour estime par ailleurs que sans « ajustements opportunistes » visant à minorer les « dépenses dans des conditions discutables », les dépenses auraient même augmenté de +2,2%.

Si la branche vieillesse affiche un résultat positif de 0,9 milliard d’euros, il convient d’intégrer le solde du FSV pour apprécier la situation des retraites. Ce dernier accuse un déficit de 3,6 milliards. Ce qui signifie que nous avons actuellement un problème de financement. Nous savons, d’après les travaux du Conseil d’Orientation des Retraites (COR), que le retour à l’équilibre budgétaire s’éloigne chaque année un peu plus. Et ce sont peut-être ces perspectives futures, à savoir la « dégradation des projections démographiques », qui inquiètent le plus les Sages de la Cour.

Pour 2017, les projections de la commission des comptes de la sécurité sociale anticipent une détérioration du déficit visé (régime général et FSV) de 1,4 milliard d’euros. Ce qui se traduirait par un déficit de 5,5 milliards d’euros contre 4,1 milliards escomptés. L’assurance maladie est encore au cœur de la problématique, puisqu’elle enregistrerait une hausse de 1,5 milliards d’euros de son déficit. Bien que l’ONDAM pour 2017 ait été fixé à la hausse à +2,1%, il apparait que ce dernier ne sera toujours pas respecté, les Sages anticipent une dérive supplémentaire à +2,4%.

Une branche assurance maladie en déficit permanent, une détérioration des perspectives financières des retraites, un niveau élevé de dette sociale (151,2 milliards fin 2016) exposé aux évolutions de taux d’intérêt, autant d’éléments sur lesquels la Cour des Comptes insiste à bon droit. Cette dernière formule une nouvelle fois des « recommandations » qu’il convient désormais de mettre en place pour « créer les conditions d’un équilibre durable ».

M