De quoi parlons-nous ?
La théorie du cycle de vie (au sens de Franco Modigliani) se réfère au comportement d’épargne des ménages, à la répartition du revenu disponible entre consommation et épargne. Cette théorie explique qu’un ménage épargne pour maintenir son niveau de consommation tout au long de la vie. Comme le passage en retraite constitue – généralement – une diminution de revenus, les ménages vont à ce moment-là puiser dans leur épargne. Si bien que l’épargne et le patrimoine constitués ont vocation à être consommés en fin de cycle.
Si nous poussons le raisonnement, le taux d’épargne d’un individu devrait être négatif et le patrimoine quasiment nul au crépuscule de sa vie. Le Conseil d’Orientation des Retraites (COR), à partir d’études et données de l’INSEE, conteste cette théorie. Dans les faits, elle ne se vérifie pas.
En se basant sur la méthode de calcul des flux par tranche d’âge, l’INSEE estime qu’en 2003 le taux d’épargne des ménages retraités était de 19%, contre 17,3% pour l’ensemble des ménages. Un taux supérieur à la moyenne, bien loin donc de la théorie. A noter toutefois la présence de disparités au sein des différentes classes d’âges. Les ménages de 50-59 ans ont un taux d’épargne supérieur aux 60-69 ans (retraités). Ce qui est logique, la première catégorie étant en fin de carrière enregistre les revenus professionnels les plus importants, la seconde correspond aux néo-retraités et par conséquent enregistre une baisse des revenus. Plus les revenus sont abondants, plus le taux d’épargne est élevé. L’étude ajoute que les 70 ans et plus épargnent davantage que les 60-69 ans, mais est dans l’incapacité de l’expliquer. Est-ce parce que cette génération est plus économe (mode de vie et de consommation) ? Est-ce parce qu’il existe une corrélation entre longévité et niveau de vie, sur le principe d’une vie moins difficile (plus longue) du fait d’une vie matérielle aisée ? Les statistiques ne permettent pas de répondre à ces questions.
Plus récent, l’INSEE dans son enquête Patrimoine 2010, confirme que le taux d’épargne des ménages retraités est proche de celui de l’ensemble des ménages. Elle confirme également les enseignements du paragraphe précédent, au détail près que pour la catégorie 70 ans et plus, elle ne constate pas un taux d’épargne supérieur. Elle souligne la forte hétérogénéité dans le comportement d’épargne des retraités. Ainsi, un tiers des ménages retraités désépargnent, un quart épargne plus de 30% de leur revenu disponible (c’est beaucoup). Des chiffres et proportions qui sont semblables au reste de la population.
Le COR avance deux explications pour justifier cette épargne tout au long de la vie : les motifs traditionnels d’épargne (précaution, transmission, baisse des besoins de consommation avec l’âge) et le niveau de revenus assuré par notre système de retraite, proche selon eux du niveau de vie atteint en milieu de carrière. Toutefois, concernant la seconde explication, le COR (en observateur aguerri) ajoute nous le citons : « du moins pour les générations actuelles de retraités »…
Les ménages français épargnent. Nous savons donc qu’ils le font tout au long de leur vie, avant et pendant la retraite. Ce qui renforce l’importance de la mise en place d’une stratégie d’épargne adéquate, de privilégier une constitution d’épargne au long terme, tout au long de la vie. En France, 25% de la population atteindront 65 ans ou plus d’ici à 2050. Ce qui aurait pu être une menace pour le stock d’épargne, ne devrait donc pas à priori en être une (bonne nouvelle). Cette épargne est vitale pour notre économie. Elle est nécessaire au financement de l’investissement, clé de la croissance future.