L’Astuce

AGIRC-ARRCO : un accord trouvé !

par | Oct 20, 2015 | Actualités

La retraite est composée d’une part de la retraite de base, comptée en trimestres, et de la retraite dite complémentaire. La retraite complémentaire est obligatoire, chaque profession bénéficie d’un régime, à la différence de la retraite de base elle est calculée par points.
Tous les salariés du privé, non cadres et cadres cotisent auprès de l’ARRCO (Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés), et les cadres cotisent en plus à l’AGIRC  (Association générale des institutions de retraite des cadres). L’ARRCO et l’AGIRC sont les deux grandes caisses de retraite complémentaire (il en existe 17). Elles concernent 18 millions de salariés, 12 millions de retraités et versent 70 milliards d’euros de pensions par an. Elles ont pour mission d’assurer la gestion du régime, calcul et versement des retraites, etc… et sont gérées paritairement par les organisations syndicales et les organisations d’employeurs.
Au début des années 90, l’AGIRC et l’ARRCO ont dû affronter une situation de déficits et prendre des mesures pour redresser leurs comptes. Elles ont alors décidé d’augmenter les cotisations, tout en diminuant les prestations offertes aux assurés. Les efforts réalisés entre 1994 et 2010 représentent 193 milliards d’euros. A l’inverse, entre 1998 et 2008, l’AGIRC et l’ARRCO ont accumulé des excédents pour 36,8 milliards d’euros, et au final constitué des réserves qui début 2008 s’élevaient à 60 milliards d’euros.
Depuis 2009, avec la dégradation de la situation économique, les régimes sont de nouveau déficitaires. Dans les scénarios les plus optimistes, les réserves AGIRC-ARRCO seraient épuisées avant 2029, et pour l’AGIRC seule d’ici 2019. Dans les scénarios les plus plausibles, les réserves seraient épuisées avant 2023, et au plus tard début 2018 pour l’AGIRC seule. Et les réserves tomberaient sous le seuil de trois mois d’allocations dès 2016, c’est-à-dire demain !
Le 18 décembre 2014, la cour des comptes publiait un rapport intitulé « Garantir l’avenir des retraites complémentaires des salariés (AGIRC et ARRCO) ». La cour s’alarme de la situation, nous la citons : « L’examen des perspectives financières de ces régimes fait apparaître une situation alarmante ». La cour ajoute « qu’il sera nécessaire de recourir à une pluralité de leviers de redressement, répartissant les efforts nécessaires entre toutes les parties prenantes : entreprises, salariés et retraités ».
Depuis début 2015, syndicats et patronat ont entamé des discussions pour apporter une réponse. Les organisations patronales (MEDEF, CGPME, UPA) ont défendu un report à 64 ans de l’âge à partir duquel un travailleur peut faire valoir ses droits à retraite. Selon le système de bonus-malus suivant : -25% pour une liquidation à 62 ans, -15% à 63 ans, et des bonus provisoires après 64 ans.
Les syndicats eux sont hostiles au recul de l’âge, ainsi qu’à une baisse du niveau des pensions. Ils proposent la création d’une taxe, ou surcroit de cotisations, pour les entreprises qui se séparent des salariés de plus de 50 ans. Sans surprise, syndicats et patronat ne sont pas sur la même longueur d’onde, ce qui faisait craindre aux observateurs une impasse. Ce qui signifie que l’Etat devrait reprendre la main sur le dossier. Cela n’arrange pas l’exécutif qui devrait prendre des mesures impopulaires. Cela n’arrange pas non plus les partenaires sociaux qui perdraient la main et leur pouvoir.
Finalement, les partenaires sociaux ont trouvé un accord. Que dit-il ?
Pour schématiser, les mesures qui permettent de redresser la trajectoire financière d’un régime de retraite, complémentaire ou non, sont toujours les mêmes : modifier l’âge de départ et/ou durée de cotisation, augmenter la cotisation, diminuer le niveau de versement des pensions.
Les partenaires sociaux ont décidé de reculer d’un an l’âge donnant droit à la retraite complémentaire à taux plein. A partir de 2019, un salarié avec 41,5 années devra travailler une année de plus pour prétendre à la retraite complémentaire complète, 63 ans au lieu de 62 ans. Dans le cas contraire, il s’expose à une perte de 10% durant trois ans (sur sa retraite complémentaire). Et à l’inverse un salarié qui partirait une, deux ou trois années plus tard, toucherait 10%, 20% et 30% de plus pendant un an. Les personnes les plus modestes sont exonérées du dispositif. Augmenter l’âge est la mesure qui d’un point de vue comptable rapporte le plus. C’est une volonté du patronat qui obtient une version allégée de sa proposition initiale.
En échange, les syndicats ont obtenu une revalorisation du taux de cotisation employeur. Et enfin entre 2016 et 2019 la revalorisation des retraites complémentaires sera limitée au taux de l’inflation moins un point, autrement dit un gel des retraites complémentaires. Cet accord devrait être validé le 30 octobre prochain.
Au final les partenaires sociaux ont su trouver un accord. C’est tant mieux car il faut réformer dès 2016 pour sauver le régime. Contrairement au régime général, l’AGIRC et l’ARRCO ne peuvent emprunter pour payer les pensions, c’est ce qui explique en partie que l’on ait trouvé un accord. Il serait intéressant d’obtenir une estimation de l’impact budgétaire des réformes envisagées pour savoir si cet accord stabilise le régime de manière pérenne, où s’il faudra passer par une nouvelle réforme (négociation) à court ou moyen terme.

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