Après la présentation du rapport de la Cour des comptes sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année écoulée, le Gouvernement a présenté jeudi 24 septembre son projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l’année 2016 (PLFSS).
Pour améliorer le solde de la sécurité sociale, il existe deux solutions : augmenter les ressources par une augmentation des cotisations (pression fiscale ou amélioration économique) ou diminuer les dépenses. La pression fiscale atteint un seuil critique et ne peut plus être un levier efficace. La conjoncture économique est caractérisée par des faibles taux de croissance qui ne peuvent répondre au défi, elle apparait davantage comme une condition nécessaire mais pas suffisante. Il reste une troisième solution : s’attaquer aux dépenses, faire des économies. A titre d’exemple, les 400 millions d’euros de « mieux » enregistrés sur l’année passée (-13,2 Md€ ; -12,8 Md€) sont le résultat de l’amélioration de la conjoncture, et en particulier d’une légère augmentation de la masse salariale.
Pour comprendre le solde de la sécurité sociale, il faut entrer dans le détail. Deux branches sont fondamentales : l’assurance maladie et la branche vieillesse.
L’assurance maladie est la plus problématique. Elle est lourdement déficitaire. Depuis 2012 c’est ainsi -5,9 Md€, -6,8 Md€, -6,5 Md€ et -7,5Md€ pour 2015. Un déficit qui interpelle par son ampleur, et par sa trajectoire non contrôlée.
Un ONDAM (Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie ) « historique » à 1,75%
Voici la première principale information de ce PLFSS : le gouvernement entend ramener le déficit de cette branche à -6,2 Md€. Présenté de la sorte, cela ressemble à une petite économie d’1,3 milliard d’euros… sur plus de 180 milliards de dépenses ! En réalité c’est plus, c’est un ONDAM « historique » de +1,75% qui est présenté pour 2016.
L’ONDAM c’est l’outil clé, c’est le montant prévisionnel des dépenses. Il permet d’avoir un pilotage des dépenses. Si les ONDAM sont respectés depuis 2010, cela n’a pas toujours été le cas dans les années antérieures. Pour schématiser, nous avons ainsi connu des périodes avec ONDAM non respectés et élevés, puis des ONDAM moyens mais respectés, et enfin des ONDAM faibles (et respectés ? Nous verrons !).
Il faut savoir que sur la période 2012-2017, la tendance naturelle d’augmentation des dépenses de santé se situe près des 4%. Quand le Parlement vote un ONDAM de 2% comme l’année dernière, le Gouvernement doit réaliser des économies pour contenir le rythme naturel d’augmentation des dépenses de Santé.
Pour l’année 2016, la hausse naturelle des dépenses de Santé se situe à +3,6%, avec un ONDAM de 1,75%, c’est 3,4 milliards d’euros d’économies à réaliser. Les plus optimistes salueront l’effort sans précédent d’un objectif d’augmentation des dépenses de santé limité. Les plus pessimistes diront que 1,75% d’augmentation au lieu de 3,6%, c’est bien, mais c’est toujours un taux de croissance des dépenses supérieur au taux de croissance de l’économie française. C’est au final du déficit nouveau qui va venir gonfler une dette qui atteint déjà les 126,6 milliards d’euros (Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale).
Deuxième annonce importante : la branche vieillesse repasse dans le vert en 2016 !
La branche vieillesse est présentée pour 2016 avec un excédent de +0,5 milliard. C’est peu mais la symbolique est forte, elle est avec l’ONDAM, la principale annonce de ce PLFSS. Ce résultat s’explique par les effets des mesures des réformes de retraite votés en 2010 (et 2014).
Il convient cependant de nuancer cette annonce, le problème du financement des retraites n’est pas réglé, même si les Ministres des Affaires sociales et des Finances savourent cette bonne nouvelle. Ce résultat, le solde de cette branche, ne prend pas en compte le solde du Fonds de Solidarité Vieillesse (FSV). Or, le FSV qui prend en compte les cotisations retraite des chômeurs et le minimum vieillesse est lui toujours déficitaire. Le déficit attendu pour 2016 est de -3,7 milliards d’euros, il est de -3,8 Md€ pour 2015.
Autre point, les projections du Gouvernement tablent sur une branche vieillesse dans le vert pour 2016, 2017 et 2018 – avec des excédents de +0,5 Md€, +1,1 Md€ et +0,4Md€ – puis attend de nouveau un déficit pour 2019. Et dans le même temps, le FSV reste déficitaire de -3,7Md€, -3,6Md€, -3,1Md€ et -2,8Md€, ce qui signifie que les retraites seront encore financées par du déficit sur les quatre prochaines années.
A travers ce PLFSS, le Gouvernement entend ramener le déficit du régime général de la sécurité social et du FSV à -9,7Md€. D’un point de vue comptable, cela représente une diminution de -3,1Md€. Un résultat qui repose sur des économies de dépenses de santé (c’est bien si ceci correspond à plus d’efficacité et ne se produit pas au détriment des patients), qui repose également sur une amélioration des conditions économiques. Un résultat qui a pour mérite de poursuivre et accentuer le processus de réduction des déficits. Mais un résultat, qui au final, continue d’alimenter une dette importante, et qui peut paraître faible au regard des enjeux et des possibilités qu’offrent les nouvelles technologies d’information et de communication.