L’Astuce

L’argent des Français en attente ?

par | Août 25, 2015 | Actualités

La Banque de France nous apprend que le mois de Juillet signe un 4ème mois consécutif de décollecte pour le Livret A, et pas des moindres ! Entre le mois de Juillet et le mois de Juin, elle passe en effet de -120 millions d’euros à -970 millions d’euros. L’annonce de la baisse du taux de 1% à 0,75% décidée et annoncée courant Juillet ayant fait beaucoup de bruit, a visiblement eu pour effet de dissuader les ménages de placer leur argent sur le Livret A.
Un effet psychologique indéniable, mais cette baisse, même à ce niveau relativement important n’est pas la première, puisqu’elle correspond au niveau de décollecte enregistré au mois de Février (et est proche de celle de Janvier). Le désamour pour le Livret A ne date pas du mois dernier, depuis Août 2014 (date de la précédente baisse de taux) nous avons constaté des niveaux de décollecte semblables et même plus importants. Pour le seul mois de Juillet c’est donc presque 1 milliard d’euros de décollecte (et même 1 milliard lorsque l’on additionne le Livret A et le Livret de Développement Durable) et 3,41 milliards d’euros depuis le début d’année. Le seul LDD perdant 30 millions d’euros sur le mois de Juillet.
Avec des taux proches de 1% (situation passée) et inférieurs à 1% aujourd’hui (0,75%), il est clair que le Livret A n’appâte pas l’épargnant (même si il y a matière à débat car les conditions avantageuses du Livret A garantissent un rendement net… d’impôts qui reste positif). Rappelons que la grande partie du Livret A est détenue par des personnes qui ont une épargne importante. On peut sans doute supposer que l’épargne des livrets A est la plus stable pour ceux qui sont déjà remplis. Par différence, les autres détenteurs moyens ou importants cherchaient plus dans le livret A un rendement. Ainsi, au fur et à mesure de la baisse du taux du Livret A, ils se mettent en quête d’un placement alternatif.
Dans ces conditions, le Plan Epargne Logement avec sa rémunération de 2% (et 2,5% pour ceux qui l’ont ouvert avant la baisse du 1er février 2015) est attractif. Pour ceux qui peuvent passer d’une épargne sinon de court terme en tout cas liquide à une épargne de moyen terme, il est aujourd’hui l’une des issues naturelles. Il entre actuellement clairement en concurrence avec le Livret A : son encours atteint 246 milliards pour la première partie de 2015.
L’autre grand gagnant de cette normalisation des taux est indiscutablement l’Assurance-vie. Elle voit sa collecte nette grimper au fur et à mesure que la décollecte du Livret A se poursuit. Ceci a lieu même si le transfert du livret A, épargne disponible, vers l’assurance-vie n’est pas automatique ou systématique. Il n’empêche : les rendements  moyens des fonds euros, et des unités de compte, respectivement de 2,5% et 5,9% en 2014, sont indiscutablement supérieurs aux rendements des autres produits d’épargne, et expliquent la bonne santé de l’Assurance-vie.
Les chiffres de dépôt à vue témoignent eux de l’indécision des Français face à la situation des taux faibles. Ils se détournent même de toute stratégie d’épargne – du moins pour le moment – laissant leur argent en compte courant. La banque de France enregistre ainsi 345 milliards d’euros d’encours pour les dépôts à vue fin 2014, et 357 milliards à la fin du premier trimestre 2015. Le constat est le même chez tous les acteurs du secteur, toutes les banques sont unanimes sur le phénomène : les dépôts à vue augmentent. Ce qui est une bonne nouvelle pour ces dernières qui vont ainsi pouvoir améliorer – pour le moment – leur ratio de liquidité sans devoir fournir d’effort particulier.
Ce comportement des ménages peut sembler curieux. D’un côté tout le monde se plaint à chaque nouvelle baisse du taux de Livret A, manifestant un mécontentement face à une baisse de rendement futur. Dans le même temps, les ménages laissent leur argent sur leur compte courant, non rémunérateur. Un comportement peu digne de l’homo-oeconomicus, sauf notre « homme » comprend ce qui se passe, ce qui ne l’empêche pas de râler !
Les ménages français sont donc dans l’attente, dans la réflexion. N’oublions pas non plus qu’ils sont inquiets de la situation actuelle, avec une croissance faible et une dette publique qui monte, même si on leur promet des impôts en baisse. Il faudra donc être attentif aux prochains chiffres d’encours du Livret A, des dépôts à vue, du PEL, et de l’Assurance-vie, pour voir si les tendances observées se confirment, ou voir quelle solution alternative les ménages français vont-ils trouver, en liaison avec un moral qui remonterait.

M