Le conseil d’orientation des retraites (COR), qui a déjà beaucoup fait parler de lui le mois dernier avec la présentation de son rapport annuel « Evolutions et perspectives des retraites en France » se réunira demain de nouveau pour plancher sur un sujet intéressant : « L’épargne en vue de la retraite et le patrimoine des retraités ». Un thème qui encore une fois alimentera le débat sur le financement futur de notre modèle de retraite. Les documents de travail du COR ayant « fuité » dans la presse, les grandes lignes en sont désormais connues.
La principale information est la suivante : les retraités vivent mieux que les actifs et ils ont un patrimoine plus important. Un patrimoine brut médian de 174.000 euros, soit un niveau supérieur de 17% à celui des actifs. Vous me direz, ce n’est pas Byzance non plus, surtout si vous comparez avec les patrimoines des différents pays du reste de l’Europe ! Et encore plus quand vous savez que ce chiffre est inférieur au prix de vente moyen d’un bien immobilier (en 2014) c’est-à-dire 213.000 euros en moyenne (selon le courtier Empruntis). Oui mais voilà, toujours est-il que les retraités ont un actif supérieur à ceux des actifs !
On pourrait expliquer ce phénomène par le fait que les retraités ont accumulé tout au long de leur vie, logique ! Au final ils ont un écart de +20% avec les actifs sur les biens immobiliers, et +70% en patrimoine financier ! Dans un premier temps on épargne pour acheter sa maison, puis on place son argent, logique ! Si on suit ce raisonnement, on doit être amenés à observer que génération après génération le phénomène se vérifie dans une relative constance, or ce n’est pas le cas ! Selon le COR « la tendance à l’enrichissement relatif des retraités s’observe au fil des enquêtes successives depuis 1986 ». En 1986, le patrimoine des retraités ne représente que 85% de celui des actifs. C’est ce que les études de l’INSEE sur le patrimoine qualifient « d’effets de générations » (Le patrimoine des ménages retraités – 2009), chaque génération n’a pas le même niveau de richesse. Par exemple, lors de sa dernière enquête l’INSEE avait pointé du doigt le fait que la génération 1963-1972 n’avait pas vu son patrimoine augmenter entre 1992 et 2004, et le patrimoine de cette génération était alors très en deçà de celui de la génération précédente.
Comment expliquer cet « enrichissement » ?
Les retraités ont connu une période économique faste, « glorieuse » ! Avec un niveau de rémunération en général régulièrement croissant. Ils ont connu une période d’augmentation conjointe de leurs revenus et de leur patrimoine. Et pour bon nombre le patrimoine étant constitué au minimum d’une résidence principale, la valorisation de leur bien et de leur patrimoine a été portée par la montée des prix de l’immobilier de ces 15 dernières années.
Ils ont un patrimoine supérieur, et également un niveau de vie supérieur aux actifs : 103% de celui des actifs ! (ce qui est le cas depuis le milieu des années 90, on oscille depuis entre 101% et 103%). Ce qui se vérifie également dans les extrêmes puisque le taux de pauvreté chez les retraités (8%) est inférieur à celui de l’ensemble de la population (13,9%). Pour résumer, quand on analyse le niveau de vie des retraités et qu’on réalise un graphique, on s’aperçoit très clairement que le niveau de vie des retraités a progressé depuis 1970 pour rattraper celui des actifs et se stabiliser depuis le milieu des années 1990 jusque 2012.
Rattrapage, niveau égal (légèrement supérieur), et demain ?
Si l’on en croit le COR, on tend vers un appauvrissement tendanciel, voici ce qu’il nous dit (de manière plus subtile) : « pour les générations plus jeunes, actuellement en activité, il est moins évident que le patrimoine progresse toujours au fil des générations… » Chose que l’on peut aisément comprendre, et même résumer de la manière suivante : pas de travail (stable) = pas de salaire, pas de salaire (CDI) = pas de crédit, pas de crédit = pas de logement, pas de logement = pas de patrimoine !
Une génération plus pauvre, qui peine à se constituer un patrimoine, dans une période économique morose, qui subit une pression fiscale sans équivalent, et qui devra faire face demain au financement de la retraite de ses ainés (sans parler de la dette publique accumulée depuis 1980, de 20% du PIB à 100% bientôt), qui vivent mieux rappelons-le. Vous l’avez compris, le COR a encore mis le doigt sur un sujet « délicat ». Déjà en juin il consacrait toute une partie de son rapport annuel sur la notion d’équité, plus précisément sur « Les dimensions de l’équité entre les générations au regard de la retraite ».
Derrière toutes ces études, tous ces articles, c’est la question qui fâche « qui doit payer ? qui va payer ? » qui se pose.
Pour illustrer le phénomène on pourrait dire que c’est comme au restaurant, lorsque vous divisez l’addition entre les convives. Dans ce genre de situation, il y a toujours des personnes qui ont moins consommé que d’autres et qui se sentent lésées. Dans le cas présent c’est la même scène, en pire ! Là vous ajoutez des personnes qui n’ont pas mangé (et qui aimeraient un jour) et qui pensent qu’il n’y aura peut-être pas de second diner, et vous les faites payer, même plus que les autres !
Nous n’arriverons pas à résoudre le problème en opposant actifs à retraités, privé à public, etc… S’il est vrai que les seuls actifs ne peuvent supporter l’effort, il est tout aussi vrai que nous ne pouvons demander aux retraités qui ont joué le jeu, en cotisant, de renoncer à leur retraite. Et pourtant il faudra bien apporter une réponse au problème de financement de nos retraites.
On dit toujours qu’un homme averti en vaut deux ! Alors, actifs, n’attendez pas le prochain rapport du COR, préparez dès aujourd’hui votre futur ! Ces derniers n’ont d’ailleurs pas attendu notre conseil pour le faire, puisque 55% des actifs déclarent épargner dans le but de préparer leur retraite (Enquête du Cercle des Epargnants Avril 2015). Et pour se faire ils ont choisi l’assurance vie, bonne idée. Ils pourront ainsi transmettre leur patrimoine de manière optimale. Ils ont raison, l’épargne d’aujourd’hui c’est le complément de plus en plus indispensable pour la retraite de demain.