L’Astuce

Agefi – dec 05- Jean-Paul Fitoussi- La dette française n'est pas élevée

par | Déc 20, 2005 | Les études

La réduction de la dette publique vous paraît-elle une nécessité ?

Il me semble que la réduction de la dette publique est une mesure sage dans le long terme. Mais il n’y a pas le feu dans la maison. La dette française n’est pas particulièrement élevée en comparaison de celle de la plupart des pays de l’OCDE et notamment de la moyenne européenne. Nous sortons aujourd’hui d’une période de très faible croissance, et ce n’est donc certainement pas le bon moment pour une cure d’austérité. La réduction de la dette pourrait alors casser la croissance, contribuant ainsi à la réduction des recettes publiques, la dette continuera d’augmenter et de n’avoir in fine aucun effet sur le montant de la dette elle-même.

Comment procéder pour réduire la dette ?

C’est une question éminemment politique. Si on veut des résultats immédiats, il faut soit baisser les dépenses, soit augmenter les impôts. On voit bien ce que cette solution aurait d’inefficace et de contradictoire par rapport à la politique suivie par les gouvernements successifs. Une autre solution consisterait à rechercher la croissance par tous les moyens, y compris ceux qui pourraient transitoirement accroître la dette, notamment l’investissement public. Le problème de la mesure de la dette est qu’elle ne donne qu’une vision partielle et donc partiale de la réalité. On oublie que la dette actuelle a permis de financer des investissements et des politiques sociales, que son accélération est due à une croissance faible et à des taux d’intérêt élevés. L’une des périodes noires pour la dette a été 1989-1997, là où elle a pris 30 points de PIB. Si l’on trouvait le moyen de baisser les dépenses, comme le préconise le rapport, sans toucher aux services que l’Etat fournit à la population, cela ne poserait pas de problème. Mais si on a du mal à le faire, c’est que cette solution entraîne des difficultés réelles. Il y a peut-être trop de corporatismes.

L’opinion publique y est-elle prête ?

Elle sera prête ou non dans la mesure où elle comprendra l’objectif que poursuit la réduction des dépenses publiques. S’il semble aller dans le sens d’un meilleur avenir pour chacun, elle le sera. Mais non s’il s’agit juste de réduire les dépenses publiques sans aucun autre objectif. D’autant que la France a déjà fait des réformes, celles des retraites en 1993 et 2003, de l’assurance maladie, du contrat de travail, etc. La France n’est pas restée inactive, malgré ce que l’on dit.

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